Une des meilleures lectures de Mademoiselle Elle en tant que jurée du Grand Prix des lectrices Elle. Pourtant elle y allait à reculons. La folie, l’enfermement et la déchéance qui semblaient être annoncés par le sujet lui faisaient peur.
♦♦♦ A LA FOLIE ♦♦♦
Cependant Joy Sorman décrit avec des mots très justes, pas seulement humains, la folie, et tous ces éléments, ces fêlures, qui font que les personnes enfermées nous sont proches. Et pourtant le livre se referme sur un mystère qui reste entier. Les dérapages dans leurs vies qui les ont menées dans le pavillon 4B, pour certains sont balisés depuis leur enfance longtemps mais pas tous. Tout le monde peut dévisser. Les histoires rapportées dans l’ouvrage nous rapprochent d’autant plus de ces destins. Ce qui peut effrayer. Mais aussi amène à s’interroger sur ce qu’est véritablement la folie, le fou d’hier n’est pas celui de demain. Cela pourrait rappeler le comportement infligé aux personnes considérées comme déviantes dans des dystopies ou dans des sociétés totalitaires.
L’auteur qui a pu passer du temps régulièrement dans 2 lieux clos, décrit avec une précision chirurgicale et poétique le fragile équilibre recréée entre ces murs. Le lecteur peut ainsi saisir la réalité de l’hôpital qui souffre du manque d’effectifs et des remplacements de l‘humain par les logiciels, un suivi informatique, la chimie et les traitements médicamenteux. Le récit nous emmène dans la souffrance des patients mais aussi des soignants. Chacun appréhende différemment le rôle qui lui est imparti et s’y tient ou déborde du cadre comme Adrienne qui les aime les fous comme elle l’affirme. Ou alors on croise des soignants qui ne veulent pas être touchés… Allez le faire comprendre aux personnes enfermés sans contacts humains… Cela peut véritablement rendre fou.
A travers différents destins nous assistons à toutes ces privations quotidiennes. Privations liées à la situation, les horaires strictement encadrés, les effets personnels placés sous clef, selon les effectifs et moyens financiers en fait.
On ressent le même sentiment d’impuissance qui doit envahir les pensionnaires, volontaires ou pas, de ces établissements avec cette vie sous clef.
N’importe quelle personne dehors ne le supporterait pas. Pour ceux enfermés, cela peut être pire pour les plus fragiles ou qui vivent dans une réalité alternative.
C’est un livre essentiel sur la folie et le traitement réservé à ces personnes actuellement. Le récit est très réussi. L’auteur y déchiffre tous les symboles, les décrypte patiemment. Symboles qui prennent une place proéminente une fois enfermé : le temps régulé, les effets personnels enfermés, les portes claquées ou entrebâillées…
En le refermant, on regarde différemment la folie. A l’aune de quel repère peut-on considérer une personne comme « folle » lorsque l’on est encore imprégné de toutes les paroles portées par l’auteur ?
Mademoiselle Elle a hâte de lire d’autres ouvrages de l’auteur qu’elle vient tout juste de découvrir avec cette immersion impressionnante. Son regard vif et les mots si justes qu’elle manie avec délicatesse ne sont que de bons présages pour les prochaines lectures…
Dans toutes les bonnes librairies, aux éditions Flammarion, 19€
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